Israël : colonialisme vert et greenwashing

Si je suis au fait de l’oppression des Palestinien.ne.s depuis toute jeune, l’actualité de ces dernières semaines m’a poussé à me renseigner davantage sur la situation. Au fil de mes lectures sur le web – …

Si je suis au fait de l’oppression des Palestinien.ne.s depuis toute jeune, l’actualité de ces dernières semaines m’a poussé à me renseigner davantage sur la situation. Au fil de mes lectures sur le web – merci à tous les lanceurs d’alerte qui ont libéré la parole et merci aux créateur-rices de contenus d’enrichir nos réflexions – j’ai découvert qu’Israël pratiquait le colonialisme vert pour accaparer toujours plus de territoire palestinien et que le pays était champion du greenwashing. Gestion des eaux, véganisme, énergie solaire, réserves naturelles, la presse internationale ne tarie pas d’éloge sur Israël. Mais tout ceci n’est qu’une vaste fumisterie qui dissimule sous un voile vert le projet colonialiste et écocidaire de l’entité sioniste. Je vous propose donc de découvrir au fil de cet article – assez costaud n’hésitez pas à le lire en plusieurs fois – comment Israël a réussi la prouesse de rendre éthique et écolo ses crimes de guerres.

Disclaimer (juste au cas où il faudrait encore se mettre au clair) : critiquer les agissements d’Israël, des sionistes et colons israéliens n’est pas antisémite.

Le Proche-Orient est une des régions du monde qui subit les conséquences de la crise climatique de plein fouet (températures en hausse constante, stress hydrique …). Mais une menace plus immédiate met en danger les écosystèmes de la région : la politique coloniale israélienne. Nous verrons qu’il se base sur différents piliers et méthodes et le premier est celui de la construction d’un imaginaire complètement erroné de la Palestine avant l’arrivée des colons.

La Palestine une terre désertique et inhabité, vraiment ?

Palestine avant l’arrivée des colons était – semblerait-il – une terre désertique et vide. Une phrase plutôt connue “A land without a people for a people without a land” est encore largement utilisée aujourd’hui dans le mouvement sioniste pour justifier l’accaparement des terres et la colonisation. Pour les colons, les Palestinien.ne.s n’ont jamais existé en tant que nation/état et dans leur rhétorique raciste étaient des arriérés à qui l’ont devait apporter la civilisation. Il avaient (ont ?) la conviction qu’ils méritaient cette terre bien plus que les autochtones.

Dans la même veine, les terres palestiniennes sont décrites comme ayant été désertiques et négligées et que c’est l’arrivée des colons qui a « fait fleurir le désert ». Doit-on rappeler que la région s’appelle le Croissant Fertile ? De plus, plusieurs références littéraires datant d’avant 1947 décrivent la région comme fertile et verdoyante.

En propageant cette idée de terre vide et aride, Israël justifie sa colonisation. Et même si c’était le cas, que la Palestine était désertique, sèche et qu’il ne s’agissait que de villages qui fonctionnaient sans État-nation, est-ce une justification suffisante au nettoyage ethnique de la population et aux crimes de guerres ?

Le Fond National Juif, le bras vert de la colonisation

Le Fond National Juif (FNJ) est – officiellement – une ONG s’occupant de la gestion des espaces verts et de l’eau. C’est un organisme emblématique au sein de la communauté juive. Dans sa petite boite bleue de collecte de don un peu partout, les enfants juif-ves sont encouragé à y déposer quelques piécettes. À l’occasion des grands évènements, il est régulier d’offrir un arbre planté par le FNJ. Mais derrière cette façade, se cache une stratégie de colonialisme vert des plus agressives. Pour l’illustrer, prenons le cas du parc Ayalon-Canada.

Ces 1200 hectares de forêts de pins gérées par le FNJ, ou au détour des allées d’arbres se trouvent ruines datant des premiers siècles et même un fort construit par les templiers, cachent une réalité violente. Ce parc occupe des territoires annexés en 1967 où se trouve en réalité les ruines de 3 villages palestiniens : Yalou, Imwas et Beit Nouba. 10 000 habitants expulsés et 1464 maisons rasées en un an pour jouir d’un terrain vierge de toute trace palestinienne. 20 ans plus tard les forêts de pins recouvrent les lieux (le pin est arbre particulièrement recommandé dans la littérature agricole sioniste pour son caractère invasif et sa rapidité de croissance). L’histoire et la mémoire sont effacées. Et ce n’est qu’un exemple parmi tant d’autres. Aujourd’hui on estime qu’environs 200 villages qui ont été démolis se retrouvent dans (sous ?) des parcs, réserves ou forêts israéliennes.

Ces campagnes de colonialisme vert sont rondement menées sous le slogan « turning the desert green » en se servant de l’imaginaire erronée que nous avons vu précédemment. Évidemment le FNJ n’agit pas seul et il est soutenu dans ses actions par le gouvernement.   Fun fact : le FNJ est aussi le plus grand propriétaire foncier israélien (il détient environ 15% des terres du pays) et exprime explicitement dans sa charte refuser de vendre ou de louer des terres à des non-juifs.

Les arbres : arme coloniale, drapeaux et symbole de résistance

Les arbres ont une place centrale dans la politique d’extension que mène le gouvernement sioniste. Les oliviers et pistachiers endémiques sont arrachés pour faire place aux routes et aux colonies illégales. À la place des villages et des vergers palestiniens, des forêts de pins et d’eucalyptus ont été plantées. Et les villages palestiniens restant ont été encerclés par des forêts pour éviter leur expansion.

Après la guerre de 1967, Israël s’est servi d’une ancienne loi qui permet à celui qui plante/cultive des arbres sur une terre d’en revendiquer la propriété en la détournant et en transformant la propriété individuelle en propriété de l’État si cette terre n’est pas cultivée pendant 10 années consécutives. Ainsi Israël a déclaré terre d’État plus de 40% de la Cisjordanie (en majorité des pâturages et des propriétés transmises par voie orale).

Pour lutter contre l’annexion de leurs terres, les Palestinien.ne.s plantent des oliviers comme ils planteraient un drapeau. Malheureusement ceux-ci sont souvent coupés/arrachés/empoisonnés sur ordre militaire dans cette logique constante d’effacement de l’histoire et de l’existence des Palestinien.ne.s afin de légitimer la colonisation de leurs terres. On compte près de 800 000 pieds d’oliviers détruits ces 50 dernières années dont 7000 déracinés en 2018.

L’olivier est un symbole très fort, ses feuilles ornent même le traditionnel keffieh palestinien. Dans le parc Ayalon-Canada, au milieu des pins israéliens, près des ruines des villages détruits, repoussent les oliviers qui ont été arrachés comme un signe de résistance.

La gestion de l’eau : entre opulence et stress hydrique

 Toujours dans la création d’un imaginaire qui voudrait que la Palestine fût un pays désertique, les sionistes clament haut et fort qu’avant leur arrivée l’eau était une denrée rare. Israël est aujourd’hui considéré comme un pays à la pointe de la gestion et de l’économie de l’eau avec ses systèmes d’irrigation en goutte à goutte et ses usines de dessalement. Alerte greenwashing !

Dans les fait le pays utilise plus de 70% de l’eau de la Cisjordanie, détourne 10% supplémentaire vers les colonies illégales et utilise plus de 80% des ressources en eaux souterraines de la Cisjordanie occupée et de la bande de Gaza. Israël détourne aussi la majeur partie de l’eau du Jourdain à tel point que son débit a chuté de façon dramatique : 1,1 milliards de m3/an en 1900 contre 50 millions aujourd’hui (majoritairement composés d’eaux usées) atteignant la Mer Morte.

Autre exemple frappant de greenwashing : dans la région de Susya, l’armée israélienne a déclaré des terres comme « zones militaires fermées » en s’appuyant sur la législation. Cette zone abrite 13 citernes de collectes d’eau de pluie et leur accès est refusé l’accès aux palestinien.ne.s aggravant ainsi leur pénurie quand dans la colonie voisine les israéliens jouissent de leur piscines et d’espaces verdoyants.

De façon générale, les israéliens ont une consommation en eau 4 fois supérieure à celles des palestinien.ne.s. Tandis qu’un palestinien consomme 73 litres d’eau par jour en moyenne (sachant que les recommandations de l’OMS sont de 100 L) un israélien en consomme 300.

Protection de l’environnement, énergie solaire et véganisme 

Les lois israéliennes protégeant l’environnement ne s’appliquent pas en Cisjordanie, c’est pourquoi les entreprises israéliennes polluantes s’installent sur ces territoires afin de ne pas être inquiétées des conséquences environnementales de leurs activités. Les territoires palestiniens sont vus comme des décharges, rien de plus. Ainsi plusieurs terres palestiniennes ont été polluées, ont perdu en fertilité, ont vu leur biodiversité se dégradé dangereusement et les habitants de ces zones connaissent des taux de maladies liées à la pollution supérieurs à la moyenne.

Israël « rayonne » à l’international et est reconnu comme un pionnier de l’énergie solaire. Bien sûr, le fait que les fermes de panneaux solaires sont construites sur des territoires annexés illégalement est complétement occulté. Les palestiniens sont extrêmement dépendant des compagnies énergétiques israélienne et celles-ci se permettent de rationner l’électricité dans ces territoires. Les coupures de courant sont fréquentes, sur la bande de Gaza par exemple, les habitants n’ont le droit qu’à 8h d’électricité par jour. Et pour couronner le tout, des panneaux solaires donnés par des pays européens qui servaient à alimenter certaines zones palestiniennes ont été détruit sous prétexte que leur installation ne bénéficiait pas d’un permis de construire (permis impossible à obtenir, vous vous doutez bien).

Et ma préférée : Israël est considéré comme un leader de la révolution végane. La « terre promise des véganes » avec – tenez-vous bien – une politique végétalienne au sein même de l’armée. Visiblement dans l’armée la plus morale du monde (sic) on respecte plus les animaux que les palestinien.ne.s.

La bande de Gaza concentration du racisme environnemental sioniste

La bande de Gaza est l’illustration parfaite du racisme environnementale et du greenwashing pratiqué par Israël. Les attaques presque constantes que mène le gouvernement sioniste dans cette zone ont des conséquences désastreuses sur l’environnement en plus du terrible bilan humain :

  • Depuis 2010, 95% de l’eau pompée à Gaza est impropre à la consommation en raison de la pollution engendré par l’opération « plombs durcis » (2008/2009). Des centaines de milliers de tonnes de déchets comprenant de l’amiante ou encore des carburants ont contaminé l’eau gazaoui durablement.
  • Les bombardements (comme ceux d’il y a quelques jours) provoquent la destruction de bâtiments et donc des déchets dus à la démolition de ces constructions. Des particules toxiques sont libérées sur toutes la zone, des incendies dégradent la qualité de l’air, et certains matériaux de construction toxique se retrouve à nu dans les rues.
  • Depuis la guerre de 2014 le traitement des eaux usées est presque inexistant. Elles sont rejetées dans la mer sans aucun traitement ce qui a pour conséquence de rendre 70% du littoral de Gaza impropre aux activités récréatives.
  • Très souvent, les bombardements visent les terrains agricoles et détruisent de nombreuses ressources. En 2014 3450 hectares de terres comprenant champs, vergers, fermes etc. ont été endommagés.

Bref, la politique coloniale israélienne se sert aussi de l’écologie pour arriver à ses fins

Les territoires palestiniens sont vulnérables et la colonisation israélienne et ses conséquences désastreuses sur l’environnement les positionnent dans une situation d’urgence humanitaire et climatique maximum. Il est impératif de rester critique lorsque l’on nous sert des discours élogieux sur Israël, car s’il y a bien un domaine dans lequel le pays excelle c’est bien le brainwashing. Son expansion, sa croissance, sa richesse se fait au prix de la violence, de la colonisation, de l’apartheid et du nettoyage ethnique du peuple palestinien. Se servir de la cause écologique pour dissimuler ces exactions est absolument gerbant.

La lutte écologique doit être une lutte décoloniale qui se bat auprès des peuples autochtones lésés. Il est donc impératif de se positionner et de lutter pour la souveraineté du peuple palestinien sur ses terres et ses ressources, contre la colonisation israélienne.

Palestine vivra, Palestine vaincra !


Sources :

Leave a Comment